22/10/2023

Une mort bien lointaine

" Camp de Drian, armée d’Afrique,

Hôpital ambulant de Drian

Du registre des décès dudit hôpital a été extrait ce qui suit :

Le sieur Paucorny Joseph, trompette à la huitième batterie du neuvième régiment d’artillerie, immatriculé sous le numéro deux mille huit cent quatre vingt deux, né le trente et un août mille huit cent douze à Vandières, canton de Thiaucourt, département de la Meurthe, fils naturel de Marguerite Paucorny est entré audit hôpital le quatre du mois de novembre de l’an mille huit cent trente sept, et y est décédé le quatre du mois de novembre de l’an mille huit cent trente sept par suite de fièvre.

Je soussigné, officier d’administration comptable dudit hôpital, certifie le présent extrait véritable et conforme au registre des décès dudit hôpital. 

Fait à Drian le 4 novembre mille huit cent trente sept. 

signé Chercakauff (nom probable)

Nous, sous un tendant militaire chargé de la police de l’hôpital de Prilly certifions que la signature ci-dessous, et celle de Monsieur Chercakauff, comptable, et que fois du y être ajoutée.

Fais à Bône le quatre du mois de novembre mille huit cent trente sept. 

signé Lacour

Pour copie conforme.

Le maire de Vandières Dominique Belin "

Pierre Joseph Paucorny est né à Vandières le 31 aout 1812 à 10 heures du soir, fils naturel de Marguerite Paucorny de Pont à Mousson, fille de défunt Pierre Paucorny et Marguerite Delogne.

La jeune femme a été accueillie par Jacques Barbel menuisier et Elisabeth Dardaine  (je n'ai pas trouvé de lien entre ces personnes, mais il s'agit probablement d'un lien familial).

En Algérie, au début de la conquête, les soldats français sont confrontés à une forte mortalité due aux fièvres paludéennes. Le remède contre le paludisme, le sulfate de quinine, mis au point en 1820 sera très utilisé dans les hôpitaux du pays.

Pierre Joseph meurt peu de temps après la prise de Constantine par l'armée du général Damrémont.



10/10/2023

Chemin interdit aux curés


L’éclair de l’Est mercredi 14 septembre 1910 

Audience amusante à la simple police samedi. Un curé était cité devant Monsieur Bernardin, le curé de Vittonville.

Contravention: a passé sur le terrain d’autrui et, de plus, a refusé de donner son nom au garde champêtre.

Monsieur le curé, devant une salle comble, a défendu lui-même sa cause, en un plaidoyer d’une calme ironie que nous regrettons de ne pouvoir reproduire en son entier.

C’est le 29 août 1910 que Monsieur le curé allait de Vittonville à la gare de Vandières. Pour traverser les plaines qui bordent la Moselle, trois chemins s’offraient à lui, le conduisant au bac :

L’un inabordable et que personne ne fréquente,

Un autre à peu près parallèle au premier,

Un troisième plus court.

C’est ce dernier qu’avait pris Monsieur le curé de Vittonville, comme tout le monde et comme il le fait depuis trois ans qu’il habite le pays. Il y rencontra même le garde champêtre, On se salua.

Ici, laissons la parole à Monsieur le curé.

Arrivé à la salle d’attente, j’étais seul, quand je vois l’homme au képi galonnée regarder au travers de la fenêtre. Il entre, me salue respectueusement et tout tremblant, il m’annonce qu’à son grand regret, il est obligé de me dresser procès-verbal.

« Pourquoi donc, Monsieur ? lui dis- je »

« Vous avez passé dans le pré de Monsieur Durand »

« Mais, mon brave monsieur, je ne sais pas où est le pré de Monsieur Durand, et je n’ai pu faire aucun dégât, puisque vous avez vu que je suis passé par un chemin où tout le monde passe »

« Oui, c’est vrai, monsieur le curé, mais que voulez-vous, il le faut. Monsieur Durand m'y oblige »

« Mais alors monsieur, ne serait-ce pas à ma soutane que vous en avez voulez ? »

« Autant vous dire Monsieur le curé, c’est la vérité. Si ce n’est pas malheureux »

Puis, toujours tout tremblant, le garde champêtre me demande mon nom. Je réponds, non pas en donnant mon nom, mais la qualité dont je m’honore, Monsieur le juge, puisque c’était elle, semble-t-il, qui était visée.

Il résulte bien, en effet, vu toutes les circonstances, que vous avez devant vous, non pas Monsieur Christophe électeur à Vittonville, mais un prêtre, traduit devant vous à cause de son caractères sacerdotal. (vifs applaudissements dans la salle)

Je suis à cette barre parce que je suis passé par un chemin où des milliers et des milliers de voyageurs sont passés avant le 29 août 1910 et où des centaines sont encore passés depuis cette date.

c’est un droit, monsieur le juge, que je ne conteste pas à Monsieur Durand d’autoriser tout le monde à passer par un chemin pratiqué dans son pré, et fréquenté depuis de nombreuses années, et de me faire défense à moi seulement de passer par ce chemin. Au moins encore faudrait il que cette défense fut formelle et portée à ma connaissance.

Et, Monsieur le juge, comme l’invitation à me présenter devant vous m’a occasionné des frais de déplacement et me prend un temps précieux, la veille d’une grande fête de l’église catholique, dont je suis le ministre, je demande 20 francs de dommages-intérêts à Monsieur Durand, qui a obliger à me déclarer procès-verbal.

Le ministère public a conclu à la non contravention.

Le juge de paix a adopté ses conclusions et a renvoyé Monsieur le curé de Vittonville indemne, sans lui accorder toutefois satisfaction sur sa demande reconventionnelle de 20 francs en dommages-intérêts.

Ce que Monsieur le curé de Vittonville n’a pas dit, mais ce que nous pouvons dire, nous, pour bien démontrer qu’on se trouvait là, en présence d’une manifestation de rage blocarde, c’est que le 28 août, veille du jour où le garde champêtre dut dresser procès-verbal, la frontière de Vittonville-Champey avait rehaussé de sa présence, la belle fête du patronage catholique des jeunes gens de Vandières. 

Le bloc de l’endroit, sans doute furieux, vomissait le lendemain sa colère rentrée

Le prêtre de Vittonville est Albert Auguste Christophe né le 15 février 1879 à Uruffe ( Meurthe et Moselle). Il a été ordonné prêtre en 1906 et a été nommé à Vittonville en 1908. 

Le plaignant est un des deux frères Durand, Auguste Nicolas âgé de 65 propriétaire exploitant ou son frère François âgé de 63 ans. Célibataires, ils habitent la même maison à l'angle de la rue Magot et la rue de Pont à Mousson. 

François Durand sera une des victimes de la barbarie allemande, fusillé à Bayonville le 29 septembre 1914. 



Chemin utilisé de Vittonville à Vandières longeant en partie le Trey










01/10/2023

Conflit avec l'abbé Lanoix

" Vandières le 21 juillet 1832. 

Beurotte, capitaine de la gare nationale, chevalier, de la Légion d’honneur, à Vandières.

 à Monsieur le rédacteur du journal de la Meurthe.

Monsieur le rédacteur, 

c’est avec regret que je me vois obligé de recourir à votre estimable journal pour faire connaître la conduite du curé de notre commune.

Mardi dernier, dans la matinée, ma mère, âgé de 72 ans, et ma sœur, sur le point d’accoucher se présentent à l’église pour se confesser, avec des sentiments, bien différents de ceux du pasteur duquel elles espéraient recevoir des conseils de paix, lorsque tout à coup, cet homme furibond leur dit de sortir de l’église, les traitant de canaille, etc…., et disant à ma mère que j’étais un mauvais sujet, qu’il était sûr que j’étais damné. Il prédit ensuite à ma sœur un avenir funeste. Enfin, ma mère et ma sœur se sont retirées dans un état qui me donnait de l’inquiétude, pour la dernière surtout, vu son état de grossesse avancée.

Ce que j’avance, Monsieur le rédacteur, et la plus exacte vérité. D’ailleurs, ce fait n’est pas extraordinaire de la part de cet homme, qui n’a cessé depuis et avant qu’il ait quitté Pagny d’user de tous les moyens possibles, soit en prêchant, soit autrement, de vexer, les honnêtes gens qui ne rampent pas sous lui. L’autorité supérieure, craignant de ne pouvoir le placer ailleurs, parce qu’il est trop connu, s’obstine à le laisser dans notre village où sa présence, met la division partout. Agréez, etc…., Beurotte.

Il nous est pénible d’avoir à signaler cette réclamation qui nous prouve que quelques uns des prêtres de nos campagnes ne comprennent pas toute l’étendue et la nature de leur mission.

Nous avons cru devoir retrancher de cette lettre quelques expressions qui nuiraient à la meilleure cause. Mais nous rappellerons, comme nous l’avons fait souvent, aux ecclésiastiques, que le ministère doit être tout de paix, de douceur et de bienfaisance. C’est par une façon d’agir moins âpre et moins exaltée qu’ils viendront à bout d’effacer les préventions qui existent contre eux, et d’exercer une influence légitime sur le bien-être et la moralité de leurs ouailles."

Le rédacteur de cette lettre est Jean François Beurotte, ancien militaire né a Vandières le 11 janvier 1790, militaire ayant participé aux campagnes de 1813 et 1814, blessé en 1813 à Liepzig, décoré de la légion d'honneur.

Ses parents sont Nicolas François Beurotte et Anne Monique Donnot. son père est originaire de la Meuse.

 Il est le troisième enfant d'une fratrie de 10. Sept enfants arriveront à l'âge adulte.

Sa sœur enceinte est Christine, née le 27 mai 1795. Elle s'est mariée le 14 juillet 1829 avec Nicolas Joseph Padroutte. Au moment de l'altercation , elle est enceinte de Jean Joseph son deuxième enfant qui naitra le 13 aout 1832.

Le prêtre en question est l'abbé Pierre Lanoix, curé de Vandières depuis 1775 et qui a réussi à fuir la répression contre les religieux pendant la révolution de 1789. 

Il a repris son ministère à Vandières en 1802 malgré l'hostilité de certains conseillers municipaux.

Cette altercation découle surement de tensions présentes dans la commune depuis de nombreuses années.

Lucien Beurotte, maire de Vandières à deux reprises était le descendant direct de Jean François Beurotte